L'ouverture des jeux olympiques 2024 a manifesté combien notre société contemporaine est de plus en plus engluée dans des mécanismes de perversion morale (sociopathie selon le DSM5) et sexuelle. La cérémonie d'ouverture ouvre une nouvelle voie par la transgression, selon J. Attali. Mais, quelle est cette voie ? C'est celle de la destruction du lien social, de la dimension humaine. Selon le psychiatre J.P. Lebrun ("La perversion ordinaire"), notre société contemporaine banalise les mécanismes de perversion. Elle précipite l'effondrement d'une civilisation, selon l'écrivain français Laurent Gounelle. La perte de conscience accompagne la banalisation du mal et de la violence.
On a constaté durant cette cérémonie des mécanismes de transgression, comme par exemple, l'imitation, par des individus travestis, transgenres, de "La Cène" où le Christ rassemble ses disciples autour de lui. La réponse officielle était de type "gaslighting", déni des perceptions des millions de gens, car il a été dit qu'il s'agissait du "festin des dieux" afin de faire taire ceux qui avaient été choqués par cette attitude blasphématoire, ce non-respect du sacré et des religions. La problématique transgenre est liée selon les recherches à grande échelle de Maurice Berger, pédopsychiatre et Sophie, directrice de SOS éducation, à des troubles psychiques importants et est mise en avant aujourd'hui pour des raisons idéologiques qui n'ont rien à voir avec la reconnaissance des différences (cfr. FigaroVox 20 novembre 2024). La transgression est propre à la perversion. Elle met au défi la loi, notamment l'interdit de l'inceste. Elle nie la différence, notamment la différence des sexes et des générations pour affirmer sa toute-puissance phallique. Selon R. Stoller, psychiatre, le travesti manifeste une tentative ultime de différenciation dans un système familial où il ne peut accéder à la différence ("La perversion"). La transgression est aussi un déni de la transcendance, omniprésente dans la perversion, car le pervers veut exercer son emprise et sa toute-puissance sur autrui, sur le monde. Pourtant, la transcendance fait partie des 24 forces de caractère favorables à la résilience. La transcendance est définie en psychologie positive comme l'ensemble des forces qui favorisent l’ouverture à la dimension universelle, au lien avec l’univers, donnant du sens à la vie. Il peut s'agir de la reconnaissance de la beauté, la gratitude (conscience des bonnes choses qui arrivent, remercier autrui), l'espoir, la croyance que le mieux peut arriver et y travailler, l'humour, l'enjouement, la spiritualité, la foi (croyance forte sur la raison d’être de l’univers et sur la conscience qui le régit. Connaître sa place dans l’univers).Boris Cyrulnik l'a constaté lui-même, bien qu'il ne soit pas croyant, dans son livre "Psychothérapie de Dieu".
Une petite fille participe à la table, comme s'il s'agissait en plus de corrompre les enfants dans cette réduction de l'autre à l'état d'objet. Un des individus laisse apparaître ses testicules devant l'enfant, banalisant l'exhibitionnisme pervers. Pourtant, l'enfant, de par son immaturité sexuelle, n'est pas intéressé par ce genre de démonstration avant l'adolescence. Il peut en être traumatisé s'il n'y a personne pour lui permettre de s'exprimer à ce sujet ("Psychopathologie de la pédophilie - Identifier, prévenir, prendre en charge", de A. Bilheran et A. Lafargue, 2013). Ces psychologues cliniciennes constatent déjà des réactions traumatiques chez les enfants qui ont reçu des enseignements sur la sexualité avant l'âge de 12 ans dans les écoles. Sophie Audugé et Maurice Berger dénoncent la dérive totalitaire de l'enseignement de la sexualité et les risques que fait peser l'éveil à la sexualité à l'école.
On a observé une banalisation du couple à trois, car des individus miment une rencontre sexuelle à trois, dans une totale impudeur et désinvolture. Ils valorisent une sexualité où l'autre est réduit à l'état d'objet de désir. Le pervers nie la rencontre de coeur à coeur dans la relation sexuelle, le partage des sentiments, des émotions et des sensations. Il veut détruire le lien avec l'autre et ce lien implique l'empathie, la tendresse, la reconnaissance de l'autre, selon les psychiatres Hurni et Stoll ("La haine de l'amour"). L'évocation du livre "Le diable au corps" rappelle cette dimension destructrice de la relation où règne la perversion morale ou sexuelle.
On a vu un tableau de la décapitation de Marie-Antoinette, image très violente, particulièrement pour les enfants. Dans ce contexte de provocation sexuelle, cela évoque le déni du féminin propre à la perversion. Le pervers nie le féminin, la vulnérabilité, la sensibilité, l'acceptation de la souffrance et des émotions. Il valorise l'action, la performance et la toute-puissance pour obtenir le pouvoir sur l'autre.
D'autres tableaux évoquent pour les chrétiens des images de mort, comme le cavalier blanc, masqué, ailé, sur son cheval blanc. Ils mettent en scène les quatre cavaliers de l'apocalypse, dont l'ange de la mort. De même, le passeur qui remonte, dans sa barque, avec la flamme olympique de sous la terre évoque le passeur des morts, Hadès.
Ces mises en scène mettent en lumière d'autres phénomènes pervers existant dans notre société. Ch. Dejours, sociologue, ("Souffrance en France") dénonce la réduction des individus à l'état d'objets utilisables, puis jetables quand ils sont épuisés par l'exigence de performances sans limites dans les entreprises et les institutions. En effet, on voit partir les enfants sur un bateau qui les emmène vers la mort, soumis aux conditionnements sociaux et familiaux, parfois pervers selon le vécu transgénérationnel de chaque famille, selon l'assujettissement aux écrans comme moyen d'évasion, par exemple. Internet est un lieu privilégié pour les prédateurs sexuels. Les écrans utilisés à l'excès déconnectent l'enfant de son corps, de ses émotions et réduisent ses capacités d'apprentissage.
Dejours décrit l'absence de reconnaissance positive dont se plaignent de plus en plus de patients épuisés et déprimés, en psychothérapie. Malgré leurs efforts, leur suradaptation à cette machine sociale, ils sont broyés, sans être pris en considération dans leur souffrance au travail. Il dénonce également le silence des collègues, témoins du harcèlement que subissent ceux qui se démarquent des plans prévus pour eux ou qui se plaignent de l'exploitation, puis du rejet qu'ils ont subi dans leur entreprise suite à leur épuisement.
M. F. Hirigoyen, psychiatre, dénonce ("Le harcèlement moral") l'augmentation des fonctionnements de prédation dans les multinationales exploitant sans conscience les individus comme des ressources jusqu'à l'épuisement, sans culpabilité et sans respect de l'humain. C'est dans ce contexte qu'elle a mis en évidence la perversion narcissique, prédation associée à la manipulation machiavélique des consciences.
M. Hurni et G. Stoll, psychiatres, ont décrit dans "La haine de l'amour", comment ces mécanismes de perversion morale et sexuelle détruisent le couple grâce à leurs consultations en sexologie : réduction de l'autre à l'état d'objet, destruction par le biais de violences verbales, psychologiques et sexuelles, économiques, phobie de l'intime et du sexuel sous l'apparence d'une exposition sans pudeur des violences dans la sexualité. Ils expliquent comment ces mécanismes pervers sont une protection contre des abus sexuels ou émotionnels vécus dans l'enfance de ces individus, mais niés. En faisant souffrir l'autre, ils reproduisent les abus subis et évitent de ressentir la souffrance insupportable de leur passé.
Heureusement, la prise de conscience de ces mécanismes de perversion morale ou sexuelle comme mécanismes de protection contre la souffrance subie dans l'enfance peut aujourd'hui être accompagnée de soins. Cependant, il est plus facile de préserver et protéger les enfants que de reconstruire un adulte détruit dans son enfance par l'absence d'intérêt pour le développement de son cerveau, de ses capacités cognitives, émotionnelles et sociales. La théorie polyvagale de S. Porgès, neuroscientifique et Professeur de psychiatrie à l’Université de Caroline du Nord, met en évidence l'importance du système d'engagement social pour transmettre la sécurité intérieure. Celle-ci est une force de résilience ("Théorie polyvagale et sentiment de sécurité"). Le sentiment de sécurité est créé chez l’enfant par une attitude calme, une bienveillance dans le regard, l’expression du visage, le ton de la voix apaisante de la figure d’attachement. C’est l’expression d’un système nerveux bien régulé chez le parent. Celui-ci peut accueillir les émotions, les apaiser et satisfaire les besoins de l’enfant. L’enfant a besoin de cette co-régulation par la figure d’attachement pour se développer dans la confiance, la sécurité, le coeur ouvert, en lien avec lui-même et avec le monde. Il met en évidence l’importance du lien avec la famille, la communauté, l’animal et la nature pour réduire le stress chronique, apaiser les conflits, réparer les troubles de l'attachement et soigner les traumatismes de l'enfance. Il réduit le recours aux addictions, l’isolement et le repli sur soi. L'attachement sécurisant, le soutien émotionnel, la reconnaissance des besoins de chacun facilite la cohésion d’une famille et d'une communauté. Il encourage les émotions agréables, la coopération, l'altruisme et l'empathie. Prendre soin de soi est la condition nécessaire pour prendre soin des autres. Mais, inversement, prendre soin des autres, de l’environnement, valoriser les conditions nécessaires pour créer du lien réduit les mécanismes de survie et augmente l'ouverture à l'autre (E. Contamin, « Les 5 cercles de la résilience»). Les défenses perverses en font partie. Le traitement des traumatismes individuels ou sociaux favorise la résilience générale.
La psychothérapie EMDR que je pratique avec la théorie polyvagale est un traitement nouveau des mécanismes de survie, des traumatismes. Il permet à chacun aujourd'hui de vivre à nouveau le coeur ouvert, dans l'empathie et la compassion, la coopération et un lien sécurisant avec soi ou avec autrui.Ces approches tiennent compte à la fois de la sécurité dans le corps, l'ancrage, la régulation des émotions, l'accès aux ressources internes ou externes, mais aussi de la sécurité dans le lien à l'autre. Renforcer les ressources spirituelles fait partie de la résilience, comme renforcer les ressources psychologiques, émotionnelles, relationnelles, en lien avec la nature, le corps, ...etc. L'identification des ressources de la personne, d'une communauté, d'une famille, aide à restaurer la solidarité, la coopération et la sécurité. Ces nouveaux modèles de résilience permettent l'accueil des parties du moi en survie, l'apaisement de l'insécurité qu'elles nient et la désensibilisation des traumatismes. Ils valorisent des démarches collectives comme le mouvement de la Transition, par exemple. Agir à un niveau a des répercussions sur les autres niveaux dans un processus évolutif. Ils ont en commun le sentiment de sécurité au travers du lien avec soi-même et avec autrui (couple, famille, communauté, société ou écosystème). Ils démontrent une résilience individuelle et sociale possible.
Christine Calonne, psychologue clinicienne et psychothérapeute reçoit à Namur et à Thimister (Province de Liège). Vous pouvez la rencontrer également par visioconférence +32 42 90 58 14.