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Enfant de parent pervers narcissique : l'identification partielle à l'agresseur

Le 07 septembre 2020
Enfant de parent pervers narcissique : l'identification partielle à l'agresseur
L'enfant victime d'un parent pervers narcissique peut souffrir du syndrome de Stockholm. il s'identifie partiellement à l'agresseur. Avec le temps, la programmation du parent PN, il peut s'identifier totalement à celui-ci. Comment faire face à l'emprise ?

A. L'identification à l'agresseur : le syndrome de Stockholm 

L’enfant ou l’adolescent victime du parent pervers narcissique (PN) souffre du syndrome de Stockholm.  Le syndrome de Stockholm a été étudié suite à un braquage et une prise d’otages dans une banque en 1973 à Stockholm. L’intervention des forces de l’ordre incite les deux braqueurs à se réfugier avec les quatre otages dans la chambre forte de la banque. Ils négocient pendant 6 jours la libération de ceux-ci contre de l’argent, des armes, un gilet pare-balles et un avion afin de s’échapper. Durant ces 6 jours s’installe entre les agresseurs et les victimes une relation de séduction réciproque, faite de sympathie, d’estime, de compréhension et d’alliance contre les forces de l’ordre. Une fois libérés, les employés prennent la défense de leurs agresseurs. L'une des otages exige pour sortir que ses agresseurs passent devant les otages afin de les protéger de tirs éventuels. Avant de sortir, l’agresseur et les otages s’embrassent et se disent au revoir chaleureusement. Après l’arrestation, les victimes refusent d’être témoins à charge. Elles soutiennent financièrement la défense de leurs agresseurs et vont leur rendre visite en prison. L’étude de ce syndrome a montré que l’agresseur doit être capable d’avoir des capacités mentales suffisantes pour créer une idéologie séduisante. Il ne doit exister aucun conflit ethnique entre agresseur et victime, ni aucune haine consciente. Les victimes ignorent ce syndrome ou doivent être assez manipulables pour renoncer à croire à ce qu’elles savent sur ce sujet. Ce syndrome est lié aux mécanismes de survie. Le déni, l’idéalisation, le clivage (monde extérieur mauvais/agresseur et victime bons) permettent à la victime de s’assurer sa protection par identification partielle à l'agresseur. Elle se croit ainsi préservée du danger de mort imminente qu’elle court réellement.

B. L'identification à l'agresseur chez l'enfant de PN

L'enfant victime d’un parent pervers narcissique vit également ce syndrome, puisqu’il est sous l’emprise d’un individu qui le met en danger de mort à petit feu, le plus souvent, par des micro-violences quotidiennes. Dépendant de son parent, dans l'incapacité de comprendre ce qui lui arrive, il idéalise son parent agresseur. Cette idéalisation n'est pas la même que celle d'un enfant qui idéalise, dans une relation saine, son parent, car ici, l'idéalisation a une fonction de protection contre la prise de conscience de la violence, contre la colère, la détresse et la peur. L'enfant ne peut construire une relation d'attachement sécurisante et épanouissante. Il peut être mis sur un piédestal, comme un enfant roi, pour être utilisé par le parent PN comme son bras armé après la séparation. C'est pour cette raison qu'il peut accepter de mentir à la justice, aux services d’aide à la jeunesse, ou aux services de protection de la jeunesse. Cependant, il est nié en tant que personne, dans ses émotions, dans ses besoins et son identité ne peut se développer. C'est pourquoi l'enfant se sent en danger de mort imminente (mort psychique, ou mort à petit feu par destruction de son immunité et par l'adoption de comportements autodestructeurs). Il tente de se protéger par la sympathie, la compréhension (excuser l’agresseur), l’anticipation des micro-violences en donnant satisfaction aux désirs du PN.

Ils font alliance contre le monde extérieur dans l’isolement où le PN enferme l'enfant. Le parent PN critique l’entourage, surtout les personnes clairvoyantes à son sujet, afin de réduire à rien les ressources externes de l'enfant. Privé de ressources externes et internes, à force de souffrir de micro-violences quotidiennes, l'enfant peut adopter des comportements de son agresseur, justifier tous ses comportements, agir pour le protéger. S'il n'a pas d'autre modèle que celui du parent PN, il trouve son parent PN normal et se laisse endoctriner par le parent PN. Celui-ci peut accuser le parent victime de violence, de maltraitance, de comportements négatifs qu’il n’a pas. Pour protéger le parent PN, l’enfant peut voler des objets chez le parent victime, par exemple son ordinateur, afin de donner des informations au parent PN qui en fait son bras armé. Il peut exercer sur le parent victime ou sa famille de la violence verbale, psychologique, parfois physique, avec des arguments justifiant sa violence, avec des paroles semblables à celles du parent PN, sans culpabilité.

C. Faire face à l'identification partielle de l'enfant à l'agresseur ?

Rappeler la règle de la non violence et sanctionner de façon constructive, avec des règles stables et appliquées fermement est nécessaire, car chez le parent PN, il ne reçoit pas de limites, ou bien, par moments, ce sont des comportements autoritaires niant l’enfant dans ses émotions, ses besoins, ses pensées et ses paroles. Le parent PN a un comportement imprévisible et il change les règles selon ses humeurs. Il est incapable d'un réel dialogue. L'enfant, comme le parent victime, marche sur des oeufs. Il ne sait jamais à quoi s'attendre.

Le parent victime doit éviter de se confier à son enfant, ou de lui révéler des informations qui pourraient être utilisées contre lui. Mettre sous clé les documents importants est dans ce cas nécessaire. L’enfant peut s’enfermer dans sa chambre, refuser de dialoguer, manifester des comportements autodestructeurs pour ensuite accuser le parent victime. Il peut aussi maltraiter et séduire alternativement ses frères et soeurs afin de diviser pour régner, comme le parent PN. Il peut tenter de tout diriger en imitant le parent PN dominant.

Mettre des limites et tenir compte de soi est vital pour préserver le climat familial. Mais, parfois les limites ne suffisent pas et l’enfant continue à exercer sa violence : lacérer les murs, insulter, taper dans la porte, fuguer, menacer de représailles si le parent victime ne fait pas ce qu’il veut, …etc.

Eviter de voir l’enfant comme une copie du parent PN est indispensable pour ne pas réaliser de mauvaises prophéties : « Tu es comme ta mère … Tu es comme ton père ! ». Il s'agit de différencier l'enfant sous emprise de l'enfant comme personne à part entière. Jusqu’à l’âge adulte, l’enfant se développe et peut changer. Sa personnalité n’est pas encore déterminée. Le parent victime peut s’accrocher à cette idée et garder l’espoir. Tant que l’enfant exprime une souffrance, directement ou indirectement, il n’est pas dans l’identification totale à l’agresseur.

Il est important de le confronter respectueusement même s’il n’est pas respectueux, accepter ses propres erreurs, tout en recadrant l’enfant. Accepter la distance, le retrait peut l’aider à percevoir que le parent souhaite son autonomie, contrairement au parent PN. Dans les moments plus propices à la discussion, le parent victime peut l’aider à confronter ses croyances limitantes, comme « Je dois être fort », « Je dois être parfait ».

C’est le conditionnement du parent PN éduquant son enfant à la pédagogie noire qui pousse celui-ci à repéter le même discours, les mêmes comportements. Le parent victime peut l’accompagner dans une réflexion sur la violence, ses effets délétères, comme le fait de se retrouver seul, être confronté à la loi, ...etc. Garder confiance en lui et lui montrer peut laisser une porte ouverte qui l’aide à sortir de l’enfermement que représente l’emprise du parent PN. Le parent victime peut lui apprendre les valeurs, quels sont ses droits et ses devoirs et maintenir un dialoguer ouvert, empathique à ce sujet avec lui. Expliquer son comportement en tant que parent, ses limites propres, lui apprendre qu’il y a des choses non négociables et d’autres bien selon son âge, offre une sécurité à l’enfant. Le parent PN exerce une autorité non équitable. Le parent victime, une fois reconstruit, peut exercer une autorité juste et équitable qui permette à l’enfant d’intégrer la loi. Cette reconstruction permet de renforcer son identité mise à mal par l'emprise du PN et permet de mieux poser ses limites. Prendre du temps pour soi, se faire plaisir et renforcer ses capacités à être en sécurité, à s'aimer et se respecter permet au parent victime de maintenir une autorité constructive, une relation non violente avec l'enfant.

Mais, parfois, l’enfant d'un parent pervers narcissique s’identifie complètement à son agresseur et choisit d’être un jour son successeur. La perversion narcissique est transgénérationnelle, car l'enfant redoute de perdre le lien vital pour lui et craint les représailles en cas de mise à distance. Malgré les démarches en psychothérapie, aux services d'aide à la jeunesse ou au service de protection de la jeunesse, malgré des expertises qui n'aboutissent à rien, certains parents victimes sont privés de la relation à leur enfant devenu adolescent, car il s'identifie à son agresseur. Il peut très bien manipuler les intervenants sociaux comme le parent PN en les séduisant et en se faisant passer pour la victime. La situation s'inverse. Il s’agit alors de faire le deuil d'une relation destructrice pour soi. C’est difficile, mais vital.